News

Parole aux experts : rencontre avec M. Amadou SIDIBE

L’expertise des chercheurs en amélioration des plantes et leurs différents centres techniques habiletés à apporter plus de crédibilité au système de protection des obtentions végétales de l’OAPI  représentent des sources importantes d’innovation pour relever les défis que connait le milieu agricole en Afrique.

Partageons  l’expérience de  M. Amadou SIDIBE point focal  ITRA au Togo.

Bonjour M. Amadou SIDIBE, parlez-nous de vous (brève présentation, de vous, votre fonction, votre activité)

 Technologue Semencier  de Formation, je suis présentement Chef de l’Unité des Ressources Génétiques de l’IER ; Point Focal du Mali  des Ressources Phytogénétiques, du Traité International sur les Ressources Phyrogénétiques pour l’Alimentation et l’Agriculture et également Point Focal du Mali de la Commission des Ressources Génétiques pour l’Alimentation et l’Agriculture. A cet effet je m’occupe de nos jours de la gestion, conservation et utilisation durable des ressources génétique au Mali en plus du suivi des traités et conventions.

Membre du Comité des Semences d’Origine Végétale,  J’ai commencé ma carrière en 1983 par le Contrôle et la Certification des Semences à la Section Réglementation Contrôle des Semences Sélectionnées de l’Institut d’Economie Rurale (IER),  puis Chef du  laboratoire des Semences du Mali (Contrôle : Inspection au champ analyse au laboratoire et Certification des Semences). Au retour de formation des Etats Unis d’Amérique, j’ai participé activement au processus de normalisation des règlementations et législation pour les pays membres de la CEDEAO, UEMOA et CILSS. J’ai plus de 30 publications scientifiques (articles, guide, manuel, etc.) et contribué à la formation des milliers de producteurs, techniciens hommes et femmes dans les domaines des semences et des ressources génétiques des plantes.

Détenteur d’un Outstanding Student Award des USA et d’une lettre de reconnaissance de la Directrice de Bioversity International Rome Italie pour contribution pour la conservation gestion et utilisation durable des Ressources génétiques des plantes au Mali et en Afrique de l’Ouest  suite à mon implication dans différents projets ce qui me réconforte.

Quand vous entendez agriculture et sécurité alimentaire en Afrique, particulièrement les zones ouest et centre, qu’est-ce qui vous vient tout de suite à l’esprit ?

C’est comme accroitre la production agricole pour faire face aux besoins alimentaires d’une population croissante. Cela ne peut se faire sans la disponibilité de semences de qualité des variétés à améliorées à haut potentiel de rendement répondant aux besoins des consommateurs, producteurs, industriels etc.

Membres de la banque communautaire de semences et de gènes du Village de Somo / Amadou SIDIBE débout en Bleu brodé avec bonnet rouge.

Vous êtes en effet un de ces acteurs qui font les coulisses du projet PPOV, quelle analyse faites-vous de cette initiative aux vues de nos réalités ?

C’est une bonne initiative qui à la longue pourra aider à mieux valoriser les travaux de recherche sur le développement et la création variétale. Ça demande plus de patience et de courage.

Ingénieur à l’ITRA  dans le cadre de ce projet, quelle vision avez-vous de la création variétale pour l’avenir agricole du continent et de votre pays en particulier ?

La création variétale demeure le socle de la production agricole  non seulement pour les besoins de subsistance mais également pour l’industrie. C’est avec de nouvelles variétés qu’on peut accroitre la production au-delà des besoins directs de consommation des produits crus et évoluer vers la transformation et la commercialisation de nouveaux produits pouvant mieux contribuer à nos économies.

Y a-t-il des variétés de plantes déjà améliorées et multipliées en semences par le Mali  qui ont également été mises sur le marché ? Si oui comment sont-elles accueillies par les consommateurs ?

Oui Le catalogue Officiel des Espèces au Mali renferme plus de 200 variétés améliorées de mil, maïs, sorgho, riz, niébé, arachide, tomate, gombo. En plus il y a des variétés améliorées de fonio et de cotonnier qui est la première culture de rente du Mali. Toutes ces variétés sont très bien accueillies par les producteurs. Il faut signaler que parmi ces variétés améliorées, il y a des hybrides de sorgho, maïs et mil.

Dans la même lancée les obtenteurs ont-ils un retour sur investissement conséquent de leurs OV quand bien même elles n’ont pas été protégées ?

Le seul retour sur investissement c’est la vente des semences certifiées dont les recettes ne couvrent pas forcément les frais d’obtention végétale. Un élément non moins important est que la recherche est supportée par les fonds publics de l’Etat du Mali avec l’appui des bailleurs de fonds.

Réfrigérateur avec échantillon de collection / accessions mil, sorgho, riz

Très souvent, dans la phase d’analyse technique des variétés végétales nouvellement créées, on parle d’examens DHS (Distinctivité, Homogénéité, Stabilité) et VATE (Valeur Agronomique Technologique et Environnementale), quel est la position de votre centre  par rapport à ces examens ?

Les examens de DHS et de VATE sont de règles dans mon pays. Toutes les variétés homologuées ces dernières années sont passé par ces tests.

La protection des nouvelles variétés à l’OAPI implique une  culture de la Propriété Intellectuelle, quelle est la stratégie mise en place par votre centre ?

Nous avons tenté initialement de protéger une cinquantaine de nos variétés, faute de financement pour maintenir la protection, elles sont tombées dans le domaine du public. Les frais de test et de protection de l’OAPI me semblent assez élevés par rapports aux recettes de la vente des semences des variétés protégées.  A mon humble  avis il serait bon de commencer par des cultures porteuses comme le cotonnier, l’arachide le riz.

Des difficultés rencontrées jusqu’ici ?

La mévente des semences certifiées. L’insuffisance de financement pour supporter l’industrie semencière. L’insuffisance voir l’absence d’infrastructure appropriés pour la conservation des semences. Les problèmes d’insuffisance de ressources humaines de qualité.

Que nous réserve la suite ?

Nous devons réfléchir ensemble sur la base des mécanismes de contrôle de qualité, de protection des variétés et mettre en place des systèmes d’homologation, de certification des semences, de protection des variétés sur la base de nos réalités de façon consensuelle avec l’ensemble des acteurs de l’industrie semencière pour mieux valoriser nos obtentions végétales.

 Nous ne devrons pas perdre de vue la gestion, la conservation et l’utilisation durable de nos ressources génétiques des plantes détenues par nos aïeux depuis des millénaires et également penser aux droits des agriculteurs.

Leave a Comment