Ces acteurs du projet PPOV dans les États membres de l’OAPI
Dans le cadre du projet de renforcement et de Promotion du système de Protection des Obtention Végétales (Projet -PPOV) de l’OAPI financé par l’Union Européenne (UE) via le programme TradeCom II du groupe ACP , nombreux sont des sélectionneurs qui y participent en mettant en évidence leur potentiel technique agricole par la création de nouvelles variétés végétales. Dr Moukoumbi Yonelle Déa Responsable du Programme National de Sélection et d’Amélioration des Plantes et Production des Semences (PNSAV-PS) du Gabon nous dévoile les coulisses de son activité de recherche pour l’évolution de l’agriculture sur le continent.
Parlez- nous brièvement de vous, de votre fonction et de votre institut de rattachement
Je suis le Dr Moukoumbi Yonnelle Déa, Sélectionneur Senior des plantes mais avec une forte expérience en riz. Je suis également Experte en Technologies Semencières. J’ai effectué mes études doctorales à l’Université d’Abomey Calavi et au Centre du Riz pour l’Afrique (AfricaRice). J’ai exercé comme Postdoc en sélection à la station régionale du Centre du Riz pour l’Afrique à Saint Louis au Sénégal et j’ai été Sélectionneur Niébé à l’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA) à Kano au Nigéria.
Je suis actuellement la Responsable du Programme National de Sélection et d’Amélioration des Plantes et Production des Semences (PNSAV-PS) que j’ai mis en place avec l’aide de ma jeune équipe de recherche et nous sommes basés à l’Institut de Recherches Agronomiques et Forestières (IRAF) au Gabon. J’exerce également en tant que Consultant International Semences. Le PNSAV-PS est un nouveau programme de recherche né d’un constat sur l’absence de matériel végétal développé ou introduit par la Recherche Scientifique ainsi que par la volonté du Ministère de la Recherche Scientifique d’accompagner le Ministère en charge de l’Agriculture dans le développement du secteur agricole de notre pays par la production et la mise à disposition de la semence de qualité des cultures céréalières, vivrières et industrielles cultivées localement.
C’est un programme de recherche spécialisée sur la production de semences de qualité à partir du matériel végétal issu des plantes annuelles (céréales, légumineuses, plantes à tubercules, banane plantain, etc.) et pérennes (plantes oléagineuses, fruitières, industrielles…) introduit ou développé par le PNSAV-PS. Ainsi, le PNSAV-PS pourra répondre aux préoccupations des acteurs du développement agricole notamment les producteurs, les transformateurs, les multiplicateurs semenciers, … à travers la création variétale (ou sélection et amélioration variétale) et la production de semence de qualité qui comprend la semence de prébase, la semence de base et appui à la production de la semence commerciale (R1 et R2) sur l’ensemble du territoire national.
Quelle est votre vision de la recherche faite sur les variétés végétales ?
La vision du PNSAV-PS est de développer ou introduire des variétés qui répondent aux attentes des consommateurs en somme des acteurs de la chaine de valeurs. Tenir compte des préoccupations et difficultés des producteurs, des transformateurs, …
Respecter le processus de création variétale et surtout conduire les tests de distinction, d’homogénéité et de stabilité (DHS) des nouvelles variétés végétales et effectuer les tests multilocaux de la valeur agronomique, technologique et environnementale (VATE) pour l’homologation des variétés sur le plan national et l’enregistrement au catalogue national des variétés. Je crois que l’organisation de la filière est possible pour que le producteur dispose de nouvelles technologies mise en place pour lui garantir un niveau de production et de revenus conséquents.
Comment vous êtes-vous lancé dans l’activité de sélectionneur ?
C’est pendant mon stage de fin de cycle Ingénieur à l’IDR de Nasso, Bobo-Dioulasso (Burkina Faso) que nous allons recevoir la liste des stages et il y avait celui de l’INERA Farakoba qui portait sur « la caractérisation agromorphologique des lignées interspécifiques (Oryza sativa x Orysa sativa) et interspécifiques (Oryza glaberrima x Orysa sativa) pour leur adaptabilité à la riziculture de basfonds» à Banfora dans la province de la Comoé. Ce fut un réel défi pour moi en tant que femme au départ, étant donné le secteur très dominé par la gente masculine, mais progressivement j’ai appris à aimer la sélection et à me l’approprier. C’est au cours de ce travail que je vais tester plus de 700 lignées et sortir 100 lignées à haut rendement résistantes à la pyriculariose foliaire, au RYMV, à la cécidomyie et adaptées aux conditions de culture du basfond. Les soixante NERICAs de basfonds largement cultivées en Afrique Sub Saharienne et partout dans le monde ont été sélectionnées à partir de ce travail.
Quand et comment avez-vous pris connaissance du projet PPOV ?
Rentrée au Gabon en 2017, j’initie les activités qui vont amener à la création du PNSAV-PS en 2019. C’est à travers nos échanges que ma collègue Dr BAYENDI LOUDIT Sandrine Marielle, point focal de l’OAPI sur les obtentions végétales à l’IRAF , m’informera de l’existence du projet PPOV et très intéressée naturellement, mon équipe et moi avons adhérer. Nous avons participé au module de formation en ligne DL 205 de l’UPOV et actuellement, nous sommes inscrites au module DL305. Nous avons participé à la formation de Lomé (février 2021) sur l’examen technique de la Distinctivité, de l’Homogénéité et de la Stabilité (DHS) des nouvelles variétés végétales. Aussi, nous prévoyons participer au séminaire national sur les obtentions végétales prévu également cette année 2021 au Gabon.
Que vous inspire ce projet pour l’avenir agricole en Afrique ?
Nous avons besoin de tel projet pour le renforcement des capacités des jeunes assistants de recherche car beaucoup d’entre eux sont formés simplement à l’agronomie générale. Ils découvrent la sélection et l’amélioration variétale sur le terrain sans formation de base. Il faut plus de projets de ce type et surtout nous aider également à la construction des banques de gènes d’où l’importance de la protection d’OV que promeut cette action d’ailleurs et qui constitue une assurance qualité, de salles de stockage et des laboratoires spécialisés car c’est compliqué de conserver le matériel végétal dans des conditions inappropriées avec un réel risque des mélanges et de perte à cause des conditions de conditionnement et du stockage à court, moyen et long termes.
Et si vous nous touchiez un mot sur une variété que vous avez amélioré ?
Toute mon expérience de sélection et amélioration variétale, je la dois à l’INERA Farakoba (Burkina Faso) et au Centre du Riz pour l’Afrique (stations de Cotonou et de Saint Louis) où j’ai tout appris, MERCI.
J’ai développé des variétés mais qui sont le label d’AfricaRice. A saint Louis sous la supervision de Dr Manneh, J’ai développé des variétés issues des croisements entre deux variétés à haut rendement NERICA-L20 et Giza178. Ce sont des lignées avec un rendement potentiel avoisinant 10 Tonnes à l’hectare. Elles ont été partagées dans le cadre de la taskforce sélection et amélioration variétale d’AfricaRice et font leur chemin dans les pays où elles se sont bien comportées. Actuellement quelques lignées vont être évaluées dans les conditions de DHS et VATE pour leur homologation prochaine et inscription au Catalogue National des Variétés dans notre pays.
Sont-elles inscrites au catalogue national ou régional?
Au niveau national, c’est en 2020 que nous avons travaillé sur les projets de décrets portant création et organisation du secteur semencier en attendant la promulgation de la loi portant politique semencière des espèces végétales végétales en république gabonaise. D’ici là on y travaille pour.
Sont-elles protégées ? Si oui ,quelle démarche en matière de valorisation avez-vous entreprise ?
On participe activement pour que les outils de règlementation aboutissent pour asseoir nos résultats de recherche grâce à leur protection à l’OAPI, garantie par l’octroi d’un certificat d’obtention végétale (COV) ; et participer ainsi pleinement à amener le producteur gabonais à utiliser la semence de qualité garantie pour sa production.
Et s’il fallait donner un conseil à d’autres chercheurs, aux semenciers ou aux agriculteurs et même au grand public pourquoi pas, que leur diriez-vous ?
D’utiliser la semence de qualité des variétés améliorées en respectant les itinéraires techniques car la semence de qualité contribue pour près de 40% à la production attendue.
Quelle est la prochaine étape ?
La conduite des essais DHS et VATE que nous approfondissons grâce aux séminaires de formation organisés par les responsables du projet si nous parvenons à disposer des financements et en espérant que sous peu nous pourrons protéger et inscrire toutes les futures variétés de riz dans le catalogue National des Variétés afin de débuter la production de semence de ces nouvelles variétés.
Comments on Post (1)
Yonnelle Moukoumbi
Fine